Dessinée dans les années 1950, la carte des régions françaises est aujourd’hui remise à plat à fin d’en réduire le nombre. Comment les cartes ont été faites ailleurs et sur quelles bases devrions-nous mettre à jour la carte des régions ?

FusionRegions

La décentralisation : pour quels buts ?

La décentralisation française est un processus qui n’a rien de facile car il vise à délester l’Etat central de pouvoirs qu’aucun rapport de force ne l’oblige à céder.  La France est un pays avec un état central fort, dans les pays où les régions/ états ont des pouvoirs importants, cela résulte d’abord d’un équilibre suite à un conflit historique et/ou à l’institution même de l’Etat central. L’Espagne qui a connu une période de forte centralisation lors du régime de Franco (années 1930 à 1975), l’autonomie des provinces résulte du lien fort entre les mouvements régionalistes et démocratiques qui ont combattu ensemble la dictature de Franco. La République Fédérale d”Allemagne a une constitution issue à la fois  de la volonté des alliés de na pas faire ressurgir un pouvoir central fort et des habitudes de pouvoirs régionaux, l’Allemagne n’ayant été unifiée sur un plan politique qu’en 1871. La nature décentralisée d’un pays est en général le fruit d’un compromis imposé à l’Etat central. En France, la décentralisation, hormis le cas de Corse, ne résulte pas de pressions régionalistes. La décentralisation telle que pensée depuis les années 1950 semble d’abord résulter d’une volonté de mieux gérer les ressources publiques en s’appuyant sur la proximité des décideurs avec les bénéficiaires de l’action étatique.

Mais on peut se demander, si la meilleure façon de répondre à cet objectif n’aurait pas été plutôt de pousser encore plus la déconcentration : créer des régions chargées de gérer des budgets alloués par l’Etat mais mettre à la tête de ses régions des hauts-fonctionnaires plutôt que des élus. Une critique récurrente de la décentralisation est d’avoir réduit l’efficacité de l’Etat de deux façons :

  • En encourageant le clientélisme des élus : ils auraient eu tendance à gonfler les effectifs des collectivités pour satisfaire la demande d’emplois des électeurs dans un contexte de fort chômage.
  • En stimulant des rivalités entre décideurs locaux de différents échelons (ville, département, région), chacun voulant montrer aux électeurs son “oeuvre”, ce qui au final conduit à des dépenses aux fins proches (ligne régionale de TER reliant les mêmes villes que des lignes départementales d’autocars).

La déconcentration aurait cependant deux inconvénients :

  • Si l’on veut que les fonctionnaires développent une bonne connaissance du terrain, il faut les laisser longtemps sur place, au risque de perdre en indépendance par rapport aux acteurs économiques locaux… et donc au risque de voir se développer de la corruption.
  • Réduire la légitimité des décisions prises. En pratique, les élus locaux (maires, sénateurs et députés), au-travers de leur action à Paris, auraient probablement essayé de faire pression sur les hauts-fonctionnaires…

Enfin, du moins, dans l’esprit, la décentralisation devrait aussi permettre de varier les politiques fiscales selon les territoires, ce que ne peuvent faire des fonctionnaires. En pratique, les taux fixés par les collectivités locales varient peu et ont peu d’impact économique à part de renforcer certains cercles vicieux de ségrégation territoriale (les communes riches tendent à baisser leur taxes, ce qui attire plus de contribuables riches et d’entreprises, les communes pauvres essaient de compenser en augmentant leurs taux payés par un nombre limité de contribuables).

Le but de la réforme actuelle est de rendre l’action publique plus efficace. Cela passe par  une redéfinition des missions de chaque échelon, et aussi par une réduction du nombre de régions. Puisqu’en France, le dessin des frontières régionales ne vient d'”en bas”, des régions elles-mêmes, il  reste à voir sur quels critères redessiner ces frontières….

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *